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La vie des chapitres
Un mot sur les handicapés et le chapitre St Joseph d'Arimathie
Un mot sur les handicapés et le chapitre St Joseph d'Arimathie

| Alec de Jerphanion 925 mots

Un mot sur les handicapés et le chapitre St Joseph d'Arimathie

Message d'Alec de Jerphanion, Chef du chapitre St Joseph d'Arimathie*, en fauteuil depuis 13 ans.

*https://marche-de-st-joseph.fr/article/chapitre-joseph-darimathie-hommes-en-situation-de-handicap-340

Les handicapés, pour quoi faire ?

Ils sont bons à rien et n’ont rien pas de métier, pas de biens, pas de moyens financiers, pas d’utilité. 

Et pourtant ils font partie du peuple de Dieu. Leur richesse est autre. Ils ont un capital d’expérience qui étonne et captive. Ils sont ni dans l’avoir, ni dans le faire. Ils sont dans l’être, dépouillés comme à nu dans leur humble condition d’homme.

J’ai bien noté que devenu handicapé, je bénéficie d’une plus grande écoute et attractivité. L’autre se fait plus proche. Les paroles et les regards échangés dévoilent l’âme. Chacun s’en trouve grandi. Chacun plus fort poursuit son chemin. A l’hôpital et dans les centres de rééducation les lieux de prière sont exigus et difficiles d’accès. Parfois ils sont des salles spécialement aménagées le temps d’une célébration. Autrement dit on en est réduit à sa chambre ou à son lit d’hôpital.

Pour prendre mon exemple, j’ai gardé au dessus de mon lit une image de la Vierge de Kalwaria en Pologne, vénérée par JP II, enfant, adolescent et adulte. J’ai gardé précieusement cette image car elle m’a été offerte par une de mes filles et est signée par mes trois enfants. Elle m’a aidé à jouer mon rôle de père tout au long de mon parcours c'est-à-dire environ 14 hôpitaux et centres de rééducation différents en 13 ans. Même lorsque mes enfants me visitaient alors que j’étais dans le coma, je suis sûr que par ma seule présence je leur transmettais quelque chose de ma manière d’être. 

Sans aller jusque là nous avons beaucoup de choses à aborder et à échanger ensemble. Chaque handicapé a un vécu qui lui est propre ainsi qu’une capacité d’analyse et d’expression personnelle. La richesse d’échange est là, à chacun de la solliciter. Isolé dans son quotidien, l’handicapé est un homme seul confronté à lui-même. Sa soif d’échange avec l’autre, de reconnaissance et de respect est grande. Il est honoré lorsqu’il est en position de donateur. Il souffre par contre de toute position qui l’enferme dans sa condition d’homme dépendant.

Rejoindre sa nature d’homme debout, capable de donner, lui confère une dimension de sens et de paix qui le touche à l’âme. Il aspire à pouvoir en faire autant, donnons lui en l’occasion. C’est l’objectif de notre Chapitre, donner un sens à l’épreuve que portent les pères handicapés. Que leur vie ait une valeur, qu’ils ne soient pas les exclus de notre société et de nos communautés. Ils ont une valeur à nos yeux. Parvenir à la paternité est pour eux dans la société actuelle le résultat d’un combat incessant bien que le sujet de la Parentalité soit de plus en plus débattu. Le droit à être parents handicapés commence tout juste à être reconnu. Les pressions contre sont encore fortes.

Intégrer des pères handicapés induit être à leur côté dans les phases là de leur vie. Nous sommes attachés à ce qu’ils soient à notre tour à nos côtés et trouvent ainsi un sens à leur fragilité écho des nôtres. Il y a une richesse à être en relation avec eux. Nous avons le devoir de prendre soin d’eux et d’écouter leur message. Accepter comme ils le font de dépendre de l’autre jusque dans les gestes les plus intimes du quotidien demande un dépouillement exemplaire. Il en est de même de tous les champs de l’existence. Le recours à l’autre s’impose par nécessité dans tous les domaines et est parfois imposé. Il s’agit d’un renoncement natif en ce qui concerne les handicapés de naissance. Ils ne connaîtront jamais un autre état et pourtant ils sont des humains comme nous. 

Le dépouillement conduit à une force de jugement qui fait aller à l’essentiel. Il n’y a plus de danger latent, on est prêt à tout et n’a plus rien à perdre. Curieusement, tout s’enchaîne bien. On avance avec la conviction de tout réussir. Chacun renforce l’autre. Les obstacles s’effondrent. Donnez nous l’occasion de devenir ce que nous sommes soit des petits et des pauvres.

Ce que nous pouvons apporter, il m’est difficile de parler pour les autres, mais je peux dire ce que j’observe dans mon environnement proche. C'est à dire celui de ma relation à mes enfants. Je suis particulièrement touché par leurs paroles et leur présence à mes côtés. Elles expriment l'intervention divine dans mon rétablissement et ce qui est essentiel dans ma mission de père, la transmission concrète de la Foi. Je leur apporte la preuve de l’action du Père dans notre quotidien.

Les réalisations des uns ne sont pas celles des autres, il en va de leur courage et de leur énergie à faire bouger les choses chaque fois que c’est possible. Se battre pour vivre mérite respect et compassion. Valides et Invalides, nous sommes faits de la même pâte humaine. Ne vivons pas comme dans des ghettos, la paternité nous réunis. Que voulons-nous transmettre ? Définissons le ensemble sous le regard du Père et la protection de St Joseph. Soyons pères. Montrons le Chemin.

Le Père nous attend au Virage. Sachons le prendre. Nous ne sommes pas là pour rien.

Nous avons des choses à faire ensemble. Si nous unissons nos voix chacune associée à l’autre aura plus de poids. Les Invalides apporteront aux Valides le supplément d’écoute dont ils bénéficient. Nous pourrons ensemble mieux relever les défis que nous lance notre monde.

Il est temps, l’heure est proche.

Rappelons-nous : « Si vous devenez ce que vous êtes, vous mettrez le feu au monde »

Alec

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