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Centenaire de la canonisation de Sainte Jeanne d'Arc
Centenaire de la canonisation de Sainte Jeanne d'Arc

| Stanislas Péronnet 3486 mots

Centenaire de la canonisation de Sainte Jeanne d'Arc

Au delà des clichés et des récupérations politiques, Jeanne est cette jeune voyante, très pure, très belle et très forte, issue de nobles familles, qui a transformé l'histoire de France, morte en martyre le 30 mai 1431 et canonisée le 26 juin 1920.

A l'interrogatoire de Poitiers, Guillaume Aimery lui dit : « Jeanne, vous demandez des gens d'armes, et vous dites que c'est le plaisir de Dieu que les Anglais s'en aillent. Si cela est, pas n'est besoin de gens d'armes, car Dieu seul y suffit. - En nom Dieu ! répond-elle, les gens d'armes batailleront et Dieu leur donnera la victoire». Ces paroles renferment un grand enseignement. Dieu n'agit pas sans des hommes, prêts au combat.

Ste Jeanne d'Arc, vous qui avez donné votre vie pour la France, en ce centenaire de votre canonisation, intercédez pour notre patrie et vivifiez notre Église pour que se lèvent, partout en France, des hommes et des femmes de bonne et forte volonté pour y faire advenir celle du Christ ressuscité.

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Quelques rappels :

De l'Abbé Michel Lambert, sur le site de Notre Histoire avec Marie.

Née au XVe siècle dans une famille catholique du village de Domremy (Vosges), le destin de Jeanne d’Arc, guidée par « ses voix » pour sauver la France des Anglais, est absolument exceptionnel. Qualifiée d’hérétique par ses ennemis, condamnée injustement et brûlée vive sur le bûcher, la jeune femme sera finalement reconnue comme une grande sainte, qui est aujourd’hui patronne secondaire de la France.

Jeannette, comme on l'appelait au village de Domremy, est née le 6 janvier 1412 dans le foyer d'Isabelle Romée et Jacques d'Arc, au cœur d'une France dévastée par la guerre de Cent Ans. Depuis Azincourt et le traité de Troyes (1420), il y a en effet « grande pitié au Royaume de France » qui subit une double monarchie au profit de l'Angleterre. La date de la naissance de Jeanne reste approximative. Elle-même ne la connaissait pas exactement : lors de son procès elle déclarera avoir 18 ou 19 ans mais être née lors d'une nuit d'Épiphanie. Elle est l'aînée et voit la naissance de trois frères et d'une sœur. 

Son père, Jacques, est laboureur ce qui laisse penser que sa famille est « aisée » pour l'époque. Elle possède aussi quelques bêtes. Sa mère, Isabelle, vient du village voisin de Vouthon dans la Meuse. Son patronyme, Romée, donne à penser que des membres de sa famille ont fait pèlerinage vers Rome à une certaine époque.

Jeannette vit dans la petite maison familiale près de l'église du village, celle où elle a été baptisée dès sa naissance. Elle passe beaucoup de temps dans l'édifice religieux où elle aime entendre sonner les cloches qui lui indiquent les heures lorsqu'elle n'est pas à la maison. Dès sa plus tendre enfance, elle apprend de la bouche de sa maman les prières et affirmera plus tard qu'elle tient de sa mère tout ce qu'elle sait sur la religion.

Très pieuse, elle aime assister aux offices et se rendre en pèlerinage à la chapelle de Bermont dans le village voisin de Greux où elle prie Notre Dame de Bermont en compagnie de ses amies ou de toute personne qui veut bien l'accompagner. Tout naturellement, elle fait sa première communion en l'église de son baptême, se confessera de bonne grâce et communiera selon son gré.

Jeannette partage la vie quotidienne de la famille. Elle passe le plus clair de son temps avec sa maman qui, outre les prières, lui apprend ce qu'elle doit savoir pour tenir un ménage lorsqu'elle en aura l'âge : préparer les repas, laver le linge, coudre, filer, etc… Mais quand il le faut, elle va à la pâture communale garder le bétail pour remplacer ses frères occupés à d'autres tâches. Elle a une vie normale de jeune fille de campagne.

Jeannette a aussi un grand cœur. Elle n'hésite pas à partager son quignon de pain avec le mendiant ou à laisser sa couche au vagabond, préférant dormir dans la paille devant l'âtre. L'histoire la surnomme « la bergère de Domremy », mais Jeannette était d'abord une bergère des cœurs.

En 1425, Jeanne a 13 ans lorsqu'elle entend « ses voix » pour la première fois. Il est midi, elle se trouve dans le jardin familial, tout près de l'église. Surprise, étonnée, elle garde pour elle ce qui lui arrive et continue à vivre normalement, mais ce qu'elle entend régulièrement fait son chemin en elle. Ses voix reviennent en effet à plusieurs reprises, et pas seulement dans ce jardin : elle les entend aussi lorsqu'elle va au Bois-Chenu danser et chanter avec les jeunes gens du village sous « l'arbre de mai » ou lorsqu'elle garde le bétail.

En 1428, cela fait maintenant trois ans que Jeannette entend saint Michel, sainte Marguerite et sainte Catherine lui dire que la France, au plus mal, a besoin d'elle pour la sauver. Trois ans qu'elle se demande comment, elle, petite paysanne, va réussir. Un beau matin, suivant ses conseils, elle part sans ne rien dire à personne, sachant que son père se serait formellement opposé à son départ. Elle se rend à quelques lieues de là, au village de Burey-le-Petit, sur la route de Vaucouleurs (Meuse). Un de ses cousins y habite. Elle compte sur lui pour l'emmener à la rencontre du Sire Robert de Baudricourt, capitaine de Vaucouleurs, comme ses voix l'y invitent depuis quelques semaines. Ce dernier doit lui fournir un cheval et des hommes mais quand il voit arriver Jeanne, Baudricourt la prend pour une folle et la renvoie dans son village.

L'année suivante, Jeanne n'y tient plus. Il faut à tout prix qu'elle parte et lève une armée pour « bouter les Anglais hors de France ».Elle prétexte une naissance prochaine chez une de ses cousines pour partir de la maison familiale et se rapprocher de Vaucouleurs. De nouveau, elle va à la rencontre de Baudricourt qui, cette fois, l'entend, la croit et lui donne finalement un cheval et des hommes pour l'accompagner. Nous sommes en février et l'épopée de Jeanne d'Arc commence.

En mars 1429, elle arrive à Chinon et rencontre le « gentil dauphin » Charles. Elle ne l'a jamais vu et il se cache dans la foule des courtisans, après avoir placé un autre sur le trône, mais Jeanne ne se laisse pas prendre et elle vient s'agenouiller aux pieds de Charles, qui en est très surpris. Elle lui fait part du dessein annoncé par ses voix. Charles la croit et il lui confie le rôle de « chef des armées ». Mais Jeanne n'est ni guerrière ni soldat. Son épée marquée de cinq croix, que ses voix lui ont fait trouver en creusant derrière l'autel de l'église Sainte Catherine de Fierbois et que la tradition attribue à Charles Martel, reste le plus souvent au fourreau : elle préfère brandir sa bannière, brodée aux noms de Jésus et Marie, pour galvaniser les troupes plutôt que d'attaquer elle-même les adversaires.

Le 8 mai de la même année, Jeanne délivre Orléans du joug des Anglais. Ses voix l'aident et la conseillent en cette bataille décisive qui est finalement gagnée rapidement, contre toute attente. Dès lors, délaissant Paris et les objectifs militaires naturels, Jeanne ne pense plus qu'au sacre du roi, car c'est « le plaisir de Dieu ».

Charles VII sera couronné à Reims dès le 17 juillet. Jeanne réussit ainsi la première et la plus fondamentale partie de sa mission, car cette onction du Ciel change tout, même s'il faudra encore de longues années pour clore la guerre de Cent Ans. Le jour du couronnement, elle revoit enfin son père, invité à la cérémonie. Cela fait maintenant cinq mois qu'elle a quitté le domicile familial, mais ses parents très émus lui ont bien-sûr pardonné d'être partie sans ne rien dire.

À Compiègne, Jeanne est faite prisonnière par les Bourguignons le 23 mai 1430 qui la vendent ensuite aux Anglais. De février à mai de l'année suivante, c'est la période de son procès à Rouen devant un tribunal ecclésiastique de 40 membres présidé par Pierre Cauchon, évêque de Beauvais. Jeanne est malmenée par ses accusateurs, et on lui reproche de porter des habits d'homme. Accusée finalement d'être relapse, hérétique, apostat et subissant 70 chefs d'accusation, Jeanne est condamnée au bûcher. Durant sa détention, elle ne peut ni assister à la messe, ni communier mais le matin de son exécution, elle y est enfin autorisée : elle se confesse, assiste à la messe et communie une dernière fois.

Sur la place du vieux marché de Rouen, le matin du 30 mai 1431, est dressé son bûcher. Jeanne vit ici ses derniers instants en clamant le nom de « Jésus » à plusieurs reprises.

Durant ces 27 mois où elle a sillonné une grande partie de la France, Jeanne a toujours été un exemple lumineux de foi et de vie chrétienne. Accompagnée par un religieux, elle assiste aussi souvent qu'elle le peut à la messe, se confesse et communie. Elle entraîne ses hommes à en faire autant et à vivre en chrétiens, comme des soldats de Dieu.

En 1456, Jeanne est réhabilitée suite au procès lancé par sa mère. En 1869, la cause est introduite par Mgr Dupanloud, évêque d'Orléans. En 1894, la jeune femme est déclarée Vénérable le 27 janvier. Le 18 avril 1909, après 12 ans de procédure, Jeanne est déclarée Bienheureuse. Onze ans plus tard, en 1920, elle accède à la sainteté, près de 500 ans après sa mort. Sa fête est fixée à la date de son martyre, le 30 mai. En 1922, enfin, la France décide de faire solennellement de Jeanne d'Arc, « la sainte de la Patrie », sa patronne secondaire.

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Source : Le Point - 04/11/2013

Voilà 92 ans que la guerre de Cent Ans a débuté lorsqu'une jeune fille tout juste débarquée de Lorraine fait son entrée dans la ville de Chinon. C'est là qu'en février 1429, Jeanne rencontre pour la première fois le dauphin Charles appelé à devenir le roi de France Charles VII quelques mois plus tard. En mai 1431, on retrouve Jeanne au milieu d'un bûcher à Rouen, qui lui donne la mort à seulement 19 ans. En l'espace de deux ans, elle est devenue la figure emblématique de cet interminable conflit associant à jamais son nom à la victoire française sur les Anglais "bottés" hors du territoire par cette jeune femme, fille de paysans.

Jeanne d'Arc demeure l'un des personnages les mieux connus du Moyen Âge grâce aux deux procès dont elle a été l'objet. Le premier est le plus connu puisqu'il conduit à sa condamnation à mort. Le second est plus tardif. En 1456 a lieu un procès en réhabilitation. Lors de ces deux dates, de nombreux témoignages sont mis par écrit, comme les normes juridiques le veulent, conservés puis transmis. C'est ainsi que le déroulement de la vie de Jeanne d'Arc ainsi que sa personnalité sont bien connus et font de la Pucelle d'Orléans, la femme la plus connue du Moyen Âge.

Entre obéissance et impatience

Tout au long de son procès de réhabilitation, Jeanne est désignée comme une jeune femme très simple, pieuse. Les voix qu'elle entendrait de sainte Catherine et sainte Marguerite accompagnent cette image de jeune fille obéissante et disciplinée. Cependant, à de maintes reprises, elle donne l'image d'une personne sûre d'elle et qui ne recule devant rien pour atteindre les buts fixés par les saints qui s'adresseraient à elle : libérer Orléans assiégé par les Anglais, faire couronner le Dauphin à Reims et libérer Paris toujours aux mains des Anglais et de leurs alliés bourguignons.

Ce caractère impatient, fonceur, apparaît dès son arrivée à Chinon où se trouve le Dauphin Charles. Elle est conduite devant l'héritier du trône début mars 1429. Fin mars, elle se retrouve à Tours où une armure sur mesure est conçue pour qu'elle devienne une véritable guerrière. L'enchaînement rapide des événements ne s'arrête pas là puisqu'elle se rend en avril dans la ville d'Orléans, autour de laquelle le siège s'éternise. C'est à partir de là que l'image d'une jeune femme colérique apparaît. Jeanne d'Arc se querelle avec de nombreux chefs de guerre, personnalités orléanaises, qui misent sur l'immobilisme. Son unique but est de libérer la ville, pour cela, elle ne recule devant rien et fait preuve d'une impatience bénéfique à la morosité de la population prête à abandonner le siège. Le 8 mai, Orléans est libérée et Jeanne d'Arc est acclamée.

Cependant, ce n'est qu'une petite part de ce qu'elle a à accomplir. Jeanne repart donc retrouver le Dauphin pour le faire couronner. Toute son impatience de mener à bien ses objectifs se solde par le couronnement du désormais roi Charles VII à Reims le 17 juillet 1429. Les succès militaires viennent compléter l'engouement autour de Jeanne d'Arc. Mais le roi voit d'un mauvais oeil tant de précipitation. Il confie des missions de second plan à la Pucelle d'Orléans pour calmer son impatience. Cela se solde par sa capture devant Compiègne.

Sacrifiée pour le bien du royaume ?

L'engouement autour de la personne de Jeanne d'Arc est bien retombé lorsqu'elle tombe entre les mains des Bourguignons, alliés des Anglais, en mai 1430, en tentant d'aider la garnison de Compiègne. Une nouvelle fois, Jeanne ne compte pas se laisser faire. C'est ainsi que, par deux fois, elle tente de s'échapper. Si la première est mal connue, des détails sont donnés pour la seconde. À l'aide d'une corde, elle descend le long de la tour, mais la corde cède et elle se retrouve sans connaissance dans les fossés. Tout cela reste insuffisant pour Jeanne d'Arc qui est finalement envoyée à Rouen.

La native de Domrémy y subit un long procès qui la mène sur le bûcher un an plus tard. Sa mort laisse un goût amer pour certains, puisque Jeanne n'est pas parvenue à rendre Paris au roi de France. De plus, la guerre est loin d'être finie. Mais son sacrifice n'a pas été vain. Bien que le roi n'ait pas fait d'efforts pour la sauver, il a pu se rapprocher du duc de Bourgogne afin de conclure une trêve qui met fin à une domination anglaise sur le territoire français. Les positions anglaises en demeurent bien affaiblies.

L'histoire de Jeanne d'Arc ne s'arrête pas à ce bûcher à Rouen le 31 mai 1431. Un procès en réhabilitation en 1456 fait de la Pucelle d'Orléans une figure emblématique de la guerre de Cent Ans. Ses réussites militaires, son caractère, sa volonté la démarquent des nombreuses autres jeunes femmes et jeunes hommes se présentant devant le roi chargés d'une mission divine en sa faveur. Longuement réutilisée et même injustement détournée à des fins politiques, Jeanne d'Arc est aujourd'hui reconnue pour avoir été pieuse, obéissante et patriotique. Mais c'est avant tout une jeune femme encouragée par des voix qu'elle aurait entendues, mais surtout par la menace anglaise et bourguignonne sur son village, qui a fait parler son courage, son impétuosité et sa détermination pour venir au secours d'une armée française à deux doigts de céder sous les coups anglais.

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Source : d'après « Le Figaro. Supplément littéraire du dimanche », paru en 1925

Plus qu’aucun personnage de l’Histoire, Jeanne d’Arc a laissé des « mots » admirables ; et ceux-ci, à la différence de maintes paroles fameuses créées par la légende complaisante, présentent des garanties certaines d’authenticité. Recueillis par ses compagnons d’armes ou des témoins de sa vie, nous les trouvons consignés dans des documents d’archives historiques, les pièces du procès de Rouen et, celles du procès de réhabilitation.
Au cours du premier, qui a duré trois mois, Jeanne comparut devant le Tribunal ecclésiastique, qui compta jusqu’à soixante-quatre assesseurs. Là, toute sa vie fut étalée au grand jour, fouillée publiquement avec une curiosité implacable. Sans timidité comme sans forfanterie — on pourrait dire qu’elle parla « sans haine et sans crainte » — avec une présence d’esprit admirable, cette simple fille, qui ne savait « ni A ni B », dicta une autobiographie lumineuse par ses réponses que transcrivirent notaires et greffiers du tribunal. En voici quelques exemples.

On lui reproche d’avoir abandonné ses parents, en fille dénaturée.
— Eussé-je eu cent pères et cent mères, je serais partie, réplique-telle, attestant ainsi l’impérieux appel de ses voix.

— Jehanne, êtes-vous en état de grâce ? demande un assesseur. Question insidieuse, dilemme redoutable. Selon qu’elle répondra oui ou non, on la convaincra d’orgueil ou d’impureté.
— Si j’y suis, Dieu m’y garde ; si je n’y suis, Dieu m’y mette, répond la pieuse jeune fille, et le juge déconcerté n’insiste pas.

— Quelle langue parlaient vos voix ? demande un autre. Et la réponse, surgit, malicieuse : 
— Meilleure que la vôtre.

On l’interroge cauteleusement sur ses armes et son équipement de guerre.
— Qu’aimiez-vous mieux de votre épée ou de votre étendard ?
— Mon étendard, quarante fois mieux, réplique la Pucelle.

Elle jure en même temps que jamais ses mains de femme n’ont frappé un ennemi, même au plus épais du danger : fait qu’attesteront unanimement tous ses compagnons d’armes.  Et comme on s’étonne qu’elle ait porté son emblème jusqu’en la cathédrale de Reims, elle lance sa réponse immortelle :
— Mon étendard fut à la peine, c’était bien raison qu’il fût à l’honneur !

En 1456, vingt-cinq ans après son martyre sur le bûcher de Rouen, s’ouvrit le procès de réhabilitation. Faisant droit à la supplique adressée par Isabelle Romée, mère de Jeanne, paysanne vieillie, cassée, « pleine de larmes », le pape Calixte III ordonna la révision du procès de Rouen, en commissionnant pour l’instruire trois prélats éminents : Jean Juvénal des Ursins, archevêque de Reims ; Guillaume Chartier, évoque de Paris, et Richard de Longueil, évêque de Coutances.

Au cours de la procédure, qui dura huit mois, on interrogea dans les formes légales du droit canon 120 témoins, tant à Domremy, Orléans et Reims, qu’à Paris et à Rouen. Parmi eux, le duc d’Alençon, prince du sang ; Dunois, le Bâtard d’Orléans, blanchi sous le harnois ; le sire de Gaucourt, le capitaine Thibaut d’Armagnac, Pierre d’Aulon, chef de la maison militaire de Jeanne ; Jean de Metz — seigneur de Novelempont — et Bertrand de Poulangy, ses compagnons de la première heure, qui la suivirent depuis Domremy jusqu’à Compiègne.

C’est dans les dépositions sous serment de ces hommes dignes de foi, faites à une époque où l’autorité ecclésiastique punissait rudement le faux témoignage, que l’on retrouve une autre série des « mots » authentiques de Jeanne d’Arc.

Sans doute, vingt-cinq années s’étaient écoulées depuis les événements. Mais la sublime fille avait produit sur ses contemporains une impression ineffaçable. Comment s’étonner dès lors que ceux qui l’avaient vue à l’œuvre aient transmis fidèlement les propos qui frappèrent si fortement leur imagination ? Voici quelques glanes de ce florilège.

A la cour de Chinon, Jeanne est mise en présence du duc d’Alençon, cousin du roi de France, celui qu’elle appelle son « Beau Duc » :
— Soyez le bienvenu, Messire, dit la Pucelle. Plus il y aura de sang de France ensemble, mieux nous en vaudrons.

Suivons la guerrière dans les combats, où elle faisait « merveille de son corps et de ses paroles pour donner du cœur à ses gens », écrit l’un de ses chroniqueurs.
— Entrez hardiment, tout est vôtre, s’écrie-t-elle à l’assaut des Tourelles devant Orléans, entreprise si audacieuse que nul capitaine n’avait osé la tenter. Et le 7 mai 1429, journée décisive du siège, Jeanne s’écrie en montant à cheval : « Au nom de Dieu, j’irai, et qui m’aime me suivra ! ». Un chroniqueur du XVesiècle a mis semblable propos dans la bouche de Philippe VI de Valois, lequel cent ans auparavant aurait crié, lui aussi : « Qui m’aime me suive ! » Si l’on attribue à ces paroles la même authenticité qu’à celles de Jeanne, il faut admirer la surprenante rencontre de la pensée d’un roi très chrétien avec le cri du cœur de la paysanne lorraine, qui, ne sachant ni lire ni écrire, ignorait tout de l’Histoire de France, si ce n’est la « grande pitié du royaume ».

Le 18 juin 1429, la petite armée royale entre dans Beaugency. On tient conseil. Doit-on laisser les Anglais se retirer librement, ou faut-il les poursuivre ? Jeanne intervient hardiment pour donner son avis :
— En nom Dieu, il faut les combattre, et quand ils seraient pendus aux nues, nous les aurons !

L’ardeur de Jeanne au combat n’empêche pas son cœur d’être pétri de compassion :
— Jamais je n’ai vu couler sang de Français sans que les cheveux m’aient dressé sur la tête, a-t-elle dit. Et sa pitié s’étend aux soldats ennemis. C’est Pierre d’Aulon, son plus fidèle compagnon d’armes, qui nous a dépeint l’émoi profond de la jeune fille la première fois qu’elle vit un soldat « très fort blessé ».

Quand elle avait à subir quelque amère déception, elle montrait une constance inébranlable et avait recours à la prière : « Quand je suis contrariée en quelque manière, disait-elle, je me retire à l'écart et je prie Dieu, me plaignant à lui de ce que ceux à qui je parle ne me croient pas facilement. Ma prière à Dieu achevée, j'entends une voix qui me dit : Fille Dé (de Dieu), va, va, je serai ton aide, va ! » 

Faut-il rappeler enfin que Jeanne d’Arc fut peut-être le premier personnage de l’Histoire à prononcer le mot patrie : « Gentil Sire, dit-elle en s’agenouillant devant Charles VII, mettez-moi à l’épreuve et la patrie en sera tantôt allégée. »

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